Les fonds européens en France, ce n’est pas rien, 28 Mds d’€, et même si le raisonnement « en taux de retour » est réducteur, ce serait un comble de ne pas dépenser l’intégralité de ces fonds et de creuser notre contribution nette au budget européen. Pire que ça, ce serait nous priver d’opportunités de développement dans un contexte économique et social qui reste particulièrement tendu. Pas la peine de blâmer Bruxelles ici, c’est de notre pleine et entière responsabilité.
2 enjeux : la consommation immédiate des fonds, et la préparation de la prochaine génération des fonds.
Sur le premier point, le bilan n’est pas encourageant. Seulement 29% des fonds programmés en région au mois de juin dernier à mi-parcours. Alors bien-sûr nous ne sommes pas vraiment à mi-parcours puisque les régions n’ont été désignées que le 27 janvier 2014 comme autorités de gestion (pour des programmes qui démarrent en janvier 2014 c’est un peu fort), les Programmes Opérationnels (les PO) n’ont été adoptés qu’un an plus tard et le temps de mettre en place les systèmes de gestion et de paiement, de monter les dossiers, de les sélectionner… On aura beau avoir toutes les excuses du monde mais si à la fin 2018 nous n’arrivons pas à justifier d’un niveau suffisant de dépenses (de dépenses, pas d’engagement), le risque de dégagement d’office (retour au budget européen) est grand à la fin de l’année. Il est d’autant plus grand pour le FEDER qui n’était engagé qu’à hauteur de 26%. Pensez l’inimaginable, dans les DOM, dans les régions les plus en difficulté, on se prive de fonds directement dédiés à l’investissement productif, alors que nos entreprises ont besoin de capitaux, au digital, alors qu’il y a tellement de retards sur l’internet très haut débit, à l’énergie, alors que notre production d’énergies renouvelables est à la traine et aux transports durables alors que le FRET ferroviaire se porte si mal et que nos plates-formes / gares multimodales ne sont pas assez nombreuses.
Pour l’avenir, même combat. Quel est notre positionnement sur le devenir de la stratégie Europe 2020 et voulons-nous vraiment « sauver » la politique de cohésion ? Ce serait vraiment faire un pari de court terme, et simplement budgétaire, de laisser la politique de cohésion – donc les fonds européens – se réduire en pensant que ce sont les « nouveaux » Etats membres, les « pauvres » qui en souffriraient. Un regard rapide sur les dernières statistiques Eurostat montre que les lignes bougent rapidement, ce sont nos régions qui deviennent intermédiaires (en dessous de 90% du PIB européen) et sans exagérer, les riches d’aujourd’hui seront peut-être les défavorisés de demain au rythme de croissance et de développement de nos voisins européens (il est temps d’oublier le « plombier polonais » et de regarder en face le startupper estonien ou l’ingénieur slovaque !).
A court terme, oui nous avons des défis à relever. Mobiliser les fonds sur les dossiers les plus porteurs, en facilitant l’accès aux villes et entreprises petites et moyennes autour des coûts et montants forfaitaires. C’est un enjeu de consommation mais aussi d’efficacité économique et sociale : ne pas tout concentrer sur les métropoles et les grands centres de recherche mais multiplier les chances et les contributeurs au développement.
Franck SOTTOU